- Terminate - 30 jours, c'est 5 jours

30 jours, ça parait peu mais c'est quand même pas mal.

Un petit retour en arrière, nous sommes le soir du jeudi 21 novembre 2024. Téléphone en main, Jormi s'apprête à éteindre les 16 luminaires et le son de son atelier. Arrivé devant moi, plus rien, immobile, le temps semble s'être arrêté et l'enceinte gueule toujours.

Ça fait déjà deux versions "d'Endorphine" de Potochkine et un remixe de Starsailor avec son "Four To The Floor" qu'il ne se passe plus rien du tout. Entre deux morceaux de musique, j'entends comme un bruit, un bruit de frottement répétitif sur du verre. Les yeux de mon maître sont comme hypnotisés, alors je baisse les miens sur ses mains. C'est donc son pouce maculé de couleurs sèches que je sentais glisser sur la vitre de l'écran rayé.

Le processus n'est plus possible, je dois l'extraire du zombie qu'il est devenu.
Je tente alors un subterfuge désespéré en desserrant légèrement mon mandrin, le foret de gros diamètre qui y était logé, glisse délicatement. Il fini par me libérer et tomber sur le sol, dans un long soupir. (Venant de ma part, il y a des choses qui vous figeraient mais quant à lui plus rien ne l'embarrasse vraiment.)
Je profite alors de cet instant de captation où les yeux de mon maître pivotent sur moi pour lui demander : 

- "Peux tu multiplier 4 par 30 ?
- Euh cent vingt
- 120 par 12
- Mille quatre cent quarante
- 1440 divisé par 24
- Soixante mais qu'est-ce que tu cherches à la fin ?
- Si nos calculs sont bons et que tu passes environ quatre heures par jour à caresser sans relâche avec ton doigt cet objet certes jouissif mais tellement addictif alors mis bout à bout,... 
En un an tu as passé soixante jours, soit quasiment deux mois continus sans dormir à faire ce même geste.
- Ho merde mais lâche moi, tu veux dire quoi en vrai ?
- Ce que je veux te dire, c'est qu'au bout de dix ans, c'est environ deux ans de ta vie non-stop que tu as passé à faire défiler celle des autres sur cette vitre."

Trente jours, ça parait peu mais c'est quand même pas mal quand on décide de se libérer d'une obsession.

Quatre heures par jour sur 30 jours, c'est cent vingt heures, 
120 heures c'est cinq jours,
5 jours de vraie vie, à produire, créer, s'amuser, discuter, respirer, s'activer parfois même s'ennuyer mais 5 jours qu'il ne leur a pas donné.
On dit que passé trois jours c'est le début de la fin d'une addiction.

Trente jours, c'est 720 heures, c'est sept cent vingt heures lucides sans aucune glissade digitale sur les réseaux anesthésiques, Serte, c'est à peu prés ce temps passé devant un écran  qu'il nous a fallut pour nous établir sur ce nouveau bout de toile binaire que je me targue de vous présenter.

Mais alors pourquoi me semblait-il nécessaire de l'inciter à quitter cette Méta hypnose ?
Parce qu'a plusieurs reprises j'ai eu l'occasion de me pencher sur son épaule et ce que j'y ai vu m'a glacé la colonne. Pour une perceuse, vous me direz que c'est assez drôle mais pour quelqu'un qui a un cerveau aussi dépareillé que le mien, la salle d'attente d'une dévoreuse à méninges ça ne me dit rien qui vaille.

Que feriez vous, si vous même ou l'un de vos proche se passionnait inlassablement jusqu'à perdre la raison ou le sens de sa vie en se plongeant dans un vestibule entreposés de bulletins, que tout le monde consulte pendant des heures, attiré par un contenu cupide, enrichi de propagandes avides, d'arnaques influentes et d'une apologie sans limites de ce qu'est la folie humaines ?
Je pense que si on vous avait ouvert une telle porte en vous promettant ceci il y a quelques années de ce-là, vous n'y seriez pas entré. 

C'est pourquoi, Jormi et moi avons décidés de nous libérer de ce système de servitude conventionnel. Ne soyez pas navrés pour nous, nous ne sommes pas pour autant devenus radicalement asociales. 
Nos oeuvres, (pardon dans l'élan je m'égard) les oeuvres de Jormi continueront à être vues sur la "fesse et le saint gramme" mais uniquement par le biais de ce même lieu que vous êtes en train de lire ou d'écouter. Je m'exercerait régulièrement avec une attention particulière à ne pas trop m'emporter et le parsemer de tout ce que l'artiste peu produire et décemment dévoiler. 

Bonne visite sur le site et à bientôt, 

Syd